Réminiscences [pv Doushi]

Arwen venait d'arriver. Impossible de savoir d'où, exactement, ni par quel moyen et encore moins la raison de sa venue sur l'empire. Mais la jeune femme n'eut pas la patience de se questionner sur cet oubli incongru et admira d'un air béa le paysage d'apparence médiévale où elle était apparue. Son sourire ravi s'élargit. Une salle d'entrainement lui faisait face. L'endroit même auquel elle avait songé se rendre avant même de chercher un logis.

Elle poussa les portes de la salle et entra à l'intérieur. Alec et Milly s'entrainaient sous le regard sérieux de Néo. Arwen s'ennuya à patienter jusqu'à la fin de leurs exercices, mais il aurait été impoli de les interrompre, et elle tenait à faire bonne figure à sa rencontre avec le Maitre d'Armes. Elle avait besoin de lui. Les deux élèves finirent à peine leur entrainement que la kendoka s'avança à grands pas vers le jeune homme qui lui tournait le dos et l'interpella ensuite :

- Monseigneur...

Elle attendit que le chevalier noir se retourne enfin vers elle pour s'incliner brièvement, et enchaina aussitôt :

- Vos hommes se sont admirablement dépensés dans leur entrainement. Votre devoir d'instructeur doit être bien frustrant, de vous tenir en maitre passif devant des élèves aussi impliqués. Que diriez-vous de donner sa leçon à une jeune adepte du sabre, qui n'attend que d'être remise à sa place ?

Avant que quiconque n'ait pu répliquer, elle se tourna soudain vers Milly pour lui expliquer d'un air agacé :

- Ce n'est qu'une façon de parler, j'ai dis "hommes" pour employer le pluriel, voila tout.

Puis, elle reporta de nouveau son regard sur le maitre d'armes et attendit patiemment sa réponse, comme si elle n'avait rien ajouté entre temps.

Alec et Milly disparurent en fumée après s'être observés un instant et avoir haussés les épaules. L'instant d'après, une épée en bois se tenait dans la main du chevalier qui afficha un sourire peu habituel avant de mettre ses cheveux en arrière comme si ils avaient été mouillés, l'armure du chevalier semblait disparaitre de temps en temps pour laisser place à des habits sombre. Les deux jeune gens se regardèrent un instant avant de se lancer en combat, la lune les observaient dans le jardin du palais de la nuit, les apprentis de Néo aussi étaient là dans la salle d'entrainement, quoique des fois ils disparaissaient tous lorsque Néo (ou bien Doushi ?) touchait le lit qui se trouvait dans le coin de la chambre.

-"Vous avez de nombreuses qualités en tant que bretteur mais vous n'avez pas encore un contrôle assez accru sur vos sentiments dans le feu de l'action... Le corps même d'un combattant est son esprit et sa concentration..."

Une dernière éclaboussure du lac se transforma rapidement en une autre scène, dans laquelle Doushi avançait dans une auberge, suivit d'Arwen. Lorsqu'il se retourna vers elle, il était paré de l'armure de Néo. Alors qu'il tournait le visage, un air triste s'afficha, les scènes défilèrent toujours entre les différentes scènes, la voix de Néo se divisaient, s'entrelaçait les unes les autres.

-"En temps de guerre, l'individualisme mène souvent à la mort... ou au rejet... et je peux vous dire que le premier n'est pas le pire... Les seuls regrets que j'ai de ce monde proviennent d'une période qui date d'avant ton arrivée en Calypta... Dans mon épée, dans mon nom et dans ma peau sont présents les erreurs de mon passé, ma faiblesse..."

Arwen n'était jamais bien sûre de savoir à qui elle faisait face. Il lui semblait, le plus souvent, qu'il s'agissait de Néo, mais elle reconnaissait parfois également Doushi, les deux jeunes hommes se confondant en un seul pour lui opposer une personne à l'identité double et instable. Mais peu importait, les actions défilaient et elle le suivait pareillement : qu'il soit Doushi ou Néo, elle voulait rester avec lui. Elle le combattit donc lorsqu'il leva son épée, l'écouta avec attention lorsqu'il la conseilla, le suivit à l'auberge et compatit à sa tristesse, sans se laisser déstabiliser par la dualité qui faisait ressurgir tantôt la personnalité de son maitre d'armes, tantôt celle de son amant.

Elle posa doucement sa main sur la joue du jeune homme et tenta de le consoler :

- Tu te trompes... Nos qualités se forgent le plus souvent d'après les erreurs que nous en tirons... Je suis impressionnée par l'homme que tu as su devenir.

Elle voulut argumenter, expliquer toutes les qualités merveilleuses qu'elle lui trouvait, mais il y avait tellement de mots à exprimer, elle s'y perdit et, incapable de les exprimer de vive voix, les traduisit par un baiser tandis que l'eau du lac s'allongeait paisiblement sous leurs pieds pour remplacer la chambre du chevalier. Un ricanement familier la fit toutefois écourter son geste, elle éloigna son visage de celui de Néo et se découvrit enchainée dans la cale sombre d'un bateau, où le mage de sang l'observait d'un air narquois, l'empêchant de vraiment distinguer la silhouette de Néo derrière lui.

- Il avait l'air aussi indifférent que d'ordinaire, nécrophile. Mais rassure-toi : il t'a envoyé Alec !

Un grand éclat de rire martela l’ouïe de la kendoka, qui ferma les yeux pour faire s'écouler ses larmes tandis qu'elle sanglotait dans la salle souterraine du manoir de Milly :

- Peu importe qu'il ne s'inquiète pas pour moi, il n'en reste pas moins l'homme que j'aime... Son indifférence pour moi n'ôte rien aux valeurs que je lui trouve...

Elle rouvrit les yeux, mais Alucard n'était plus là. Seuls Doushi et elle-même se trouvaient dans la galerie : elle, recroquevillée à l'intérieur de son faible sceau tracé par son propre sang, et le chevalier à quelques pas.

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