Le retour d'Alucard [CLOS]

Dissimulé derrière un aspect qu'il revêtait rarement, Alucard traversait le domaine du Nieb pour la première fois sans que personne ne le reconnut pour s'étonner et de son retour depuis les flammes qui lui avaient été fatales, et de son exposition sereine en plein soleil. Un sourire narquois aux lèvres et le regard obstinément porté vers la direction qu'il suivait calmement, il ne se souciait pas plus de son entourage que celui-ci ne le remarquait, et avançait ainsi en bousculant sans même s'en rendre compte plusieurs passants sur son chemin. Quelques gloussements lui échappaient par moment, trahissant son impatience à célébrer dignement ses retrouvailles avec son vieil ami Calyptien.

Lorsqu'enfin il s'arrêta devant la bibliothèque, ses ricanements s'étaient interrompus et il observa d'un oeil gourmand le bâtiment un court instant avant de passer la porte, se régalant par avance des festivités prévues. Il avait pu entendre de l'extérieur la voix du dragon répondre à celle d'un inconnu et l'avait senti suffisamment occupé pour passer discrètement. Il n'eut ainsi qu'à marcher d'un pas rapide devant le poste de Mythril, que lui-même ne put qu'entrapercevoir brièvement derrière la silhouette d'un vieil homme particulièrement bavard penché sur son bureau.

Une fois éloigné par delà les interminables rangées d'étagères aux livres aussi épais que les murs de la bibliothèque elle-même, il rejoignit sa proie (ou plutôt l'une de ses proies), dont il avait tout de suite reconnu l'odeur. Elle, en revanche, ne semblait pas l'avoir reconnu. Elle était occupée par son travail et il dut prendre l'air gêné et hésitant d'un client perdu devant l'amas d'ouvrages pour attirer son attention.

La jeune femme approcha doucement jusqu'à lui et lui sourit poliment, demandant à voix basse :

- Monsieur, puis-je vous aider ? Peut-être cherchez-vous quelque chose en particulier ?

Alucard tourna alors le visage vers elle, laissant, dans le mouvement, ses cheveux s'écarter et exposer à sa proie les prunelles sang dont elle avait déjà croisé le regard avide plus d'un an auparavant.

Spoiler:

La pauvre employée se figea sur place, épouvantée et incrédule. Le vampire répondit sur le même ton aimable dans son esprit :

- Toi.

Un court instant passa, pendant lequel le prédateur et sa victime se regardèrent silencieusement, et soudain, la jeune femme se retourna pour fuir. Alucard réagit immédiatement : sa main agrippa violemment le bras de l'employée et la ramena dos contre lui. Elle se débattit et ouvrit la bouche pour crier, mais une voix gloussa dans sa tête :

- Ne te prive pas d'hurler, crie, je t'en prie ! Plus tôt tu crieras, plus tôt il viendra. Et bien que j'aurais aimé profiter plus longtemps de mon appât, je suis impatient de voir son expression lorsque je te tuerai sous ses yeux !

La jeune femme cessa aussitôt de se débattre, et elle se résigna à calmer sa respiration afin que le bruit n'attire pas Mythril. Mais elle était serrée dans les bras du monstre, et un flot continu de ricanements sadiques lui martelait l'esprit, elle ne put s'empêcher de pleurer. Alucard lui prit le poignet avec douceur et le ramena vers sa bouche, un bras enlacé autour de sa taille. Elle se laissa faire malgré son effroi : elle refusait de lui amener le gardien de la bibliothèque.

Le vampire prit son temps, arrêtant son poignet à quelques centimètres de ses lèvres pour en contempler d'un sourire moqueur la parcelle de peau où il avait léché son sang à la taverne. Du bout des doigts, il caressait le poignet tremblant, se réjouissant de faire durer l'angoisse de sa proie de plus en plus paniquée. Les battements de coeur affolés de cette dernière lui parvenait à l'oreille comme un air de musique, et l'odeur de la peur flattait son odorat. Il la pressa plus fermement contre lui. Enfin, il mordit la veine au pouls rapide, et le visage tout près de celui de son encas, il avalait à grande gorgée le sang qui affluait, lui imposant à l'oreille les bruits de succion -le bruit de la vie qui la quittait.

La jeune femme se sentait faiblir sous la perte de sang massive, et elle ne tenait plus que par le soutien du bras qui l'enlaçait. Mais elle était apaisée, pourtant. Elle avait résisté, le vampire ne lui avait pas arraché la moindre plainte et il n'aurait pas la satisfaction de se repaitre de la réaction de Mythril devant son assassinat. Tout du moins le pensait-elle... à tort, car Alucard l'avait jusque là épargnée. Il s'était contenu assez pour la garder silencieuse tout le temps où il jouait avec elle, et n'avait depuis le début qu'espéré la rendre plus "bavarde" au tout dernier moment, lorsqu'il serait lassé d'elle et pourrait passer à la distraction suivante.

Alors que la pauvre employée se confortait de ce qu'elle avait pu épargner au bibliothécaire, le mage de sang laissa tomber son poignet et la retourna tout à coup pour qu'elle lui fit face. Il avait retrouvé son apparence habituelle, et lui offrait la vision horrifiante d'une mâchoire aux dents anormalement acérées d'où débordait le sang dont il s'était gavé.

Spoiler:

L'instant d'après, la mâchoire s'était refermée sur sa gorge, mais si brutalement et avec tant de force que cette fois, elle ne put retenir sa douleur. Un long hurlement franchit ses lèvres tandis que les dents du vampire lui déchirait la peau, faisant gicler sur elle son propre sang.

Était-ce la vision du visage de celui qui l'avait plongé dans un feu infernal ou le fait d'être si soudainement privé de son gibier, il n'aurait su déterminer exactement la raison de la colère qui l'envahit tout à coup. Peu lui importait, sa rage lui dictait désormais ses réactions, et celles-ci ne se firent pas attendre. Il marcha vers le mur qu'avait traversé le dragon avec sa proie et le passa à son tour, les rejoignant en plus de la nouvelle arrivée.

Il observa d'un air impassible le bibliothécaire se placer devant ses employées dans une attitude protectrice, silencieux. Son regard s'égara ensuite dans celui, effaré, de la jeune femme venue porter secours à sa collègue. L'esprit soumis par les prunelles sang, elle déposa soudain la blessée à terre et resta à genoux tandis que ses épaules se secouaient. Un ricanement finit par s'échapper de ses lèvres entrouvertes, et lorsqu'elle releva le visage, ce fut pour éclater de rire, ses yeux carmins écarquillés de démence. La voix sèche d'Alucard s'imposa malgré les ricanements hystériques :

- Si tu ne fuyais pas le moindre combat, j'aurais pu les laisser en dehors de nos conflits. Mais tu disparais sous les coups, aussi m'obliges-tu à te détruire moralement plutôt que physiquement... Qui de nous deux implique ton entourage, poney couard ?

Il désigna la mourante d'un léger signe de tête et continua lentement, toujours accompagné du rire démentiel de la deuxième employée :

- Elle n'a plus beaucoup de temps devant elle, et l'autre pourrait bien finir par perdre définitivement la raison. A moins...

Il s'interrompit et feint de réfléchir, un index sur les lèvres, faussement hésitant. Puis il reprit soudain, changeant de sujet comme s'il venait seulement de se souvenir un détail important :

- Oh, au fait, j'aime bien mieux ce retour à tes premiers goûts vestimentaires. Je me réjouis que les jours que j'ai passé à brûler sous tes flammes t'aient finalement permis de changer de tenue.

Perdre vainement un temps précieux pendant lequel la vie de sa victime s'échappait lui était jouissif. Mais il finit malgré lui par abandonner ses sarcasmes rhétoriques pour faire durer l'attente de la mourante avec des questions plus sérieuses :

- Alors dis-moi, j'aimerais savoir : ma mort t'a-t-elle soulagé, mon ami ? Toute cette rancœur, toute cette rage, admet-le, tu les gardais en toi depuis tout ce temps n'est-ce pas ? La malédiction influençait ton comportement. Mais ces pensées rancunières, tu les refoulais depuis le début, je me trompe ?

Il n'écouta qu'à peine la réponse de Mythril, trop furieux pour être en mesure de l'entendre. Quoi que le dragon ait pu avancer, Alucard ne se satisferait de toute façon d'aucune justification. Il n'était pas venu excuser sa conduite, mais s'en venger.

Une plainte perça au travers des éclats de rire incessants. La pauvre blessée ne tiendrait pas plus longtemps, il lui fallait se lancer dans le vif du sujet. Il approcha du dragon et s'arrêta à quelques centimètres de lui, plongeant son regard dans les yeux d'or et d'azur. Enfin, il reprit d'un air froid la conversation qu'il avait interrompue :

- Tu peux libérer ta joyeuse employée de mon emprise si tu retiens suffisamment mon attention pour déstabiliser l'influence que je garde sur son esprit, et ainsi lui permettre de s'en aller sauver son amie. Je pense que tu devines aisément quelle distraction accorderait toute mon attention...

Face à Mythril, vers lequel il devait abaisser le visage pour le fixer dans les yeux, le vampire laissa quelques secondes passer avant de conclure d'un ton plus doux, qui se voulait sincère :

- Cesse de fuir, et elles pourront s'échapper.

Et sans plus attendre, il se jeta violemment sur lui et s'apprêta à plonger les canines dans la gorge du bibliothécaire. Mythril n'avait qu'une fraction de seconde pour décider de renoncer ou non à la protection de son don comme l'y incitait Alucard.

Face aux propos lancés par Alucard, le dragon voulu protester, certes les railleries du vampire pouvait l'énerver de temps en temps mais jamais il n'avait voulu se venger de la sorte, il aurait préféré se venger de manière plus enfantine mais bien entendu son vis à vis dont la colère pouvait aisément se faire sentir n'entendait pas ses excuses.
Il regarda impuissant ses employées mourir à petit feu, sous ses yeux alors qu'il ne pouvait rien faire pour les aider. Le suceur de sang lui proposait enfin une alternative, plus de temps à perdre il allait accepter quelle qu'elle soit si cela pouvait sauver les deux jeunes femme d'une mort affreuse.
Coupant sa respiration et attendant les termes du contrat il failli s'étrangler devant le brusque changement de conversation et la colère montait en lui au fur et à mesure que la vie quittait les deux demoiselles. Rouge de colère il ordonna au vampire de lui dire le moyen de les sauver mais se renfrogna sachant qu'il était le seul fautif dans l'histoire.
Alucard avait raison et il devait assumer les conséquences de ses actes, serrant les poings il était prêt à subir toutes les envies du sadique en rouge qui se dressait devant lui.
Les sous-entendus étaient de trop, cette fois il n'avait plus l'intention de fuir. Il avait blessé son ami au plus haut point en l'assassinant de sang froid, c'était certes sous la poussée de la malédiction - malédiction dont le vampire l'avait jeté... - et une fois ayant reprit ses esprits il s'en était voulu nuits et jours, ne trouvant plus le sommeil.
Son vis à vis le fixait de ses yeux sanguins, couleur de ses péchés, dardant son regard cramoisi dans celui or et azur désormais résigné du dragon. Puis celui-ci se jeta sur lui, le dragon n'essaya même plus d'esquiver, il n'utilisa même pas son don de passe-muraille et senti les crocs s'enfoncer profondément dans sa chair. Il ne put retenir un gémissement échappé sous le regard choqué de ses deux employées.
Celle qui venait d'être libérée de la possession du vampire tenta de venir en aide au blondinet mais celui-ci se mit à hurler tout en laissant perler une larme.

- Dégagez tout de suite, c'est un ordre!

Elle s'arrêta soudainement, surprise puis résignée elle attrapa la blessée et s'enfuit vers l'hôpital. Le dragon quand à lui reprit son souffle après avoir tant hurler comme un dément et la douleur qui était partie sous l'adrénaline revint au grand galop. Il sentit les crocs enfoncés en lui le déchirer et sa vie quitter son corps tandis que le vampire étanchait sa soif. Mais le dragon ne lui en voulait pas, il pleura silencieusement tout en disant un faible "désolé" à l'intention de son ami qu'il avait blessé aussi bien physiquement que psychologiquement.
Il attendait sans rien faire l'heure de sa mort, résigné. Au moins il aurait permit à deux vies d'être sauvées en échange de sa propre existence. Il se laissa choir entre les bras de son tortionnaire et bourreau qui exécutait sa sentence.

Ses canines déchirèrent la gorge offerte, et il se montra aussi impitoyable que le dragon s'était montré compréhensif. Il aspira le sang avant d'attendre qu'il n'afflue sous la pression, et but ainsi plusieurs grandes gorgées avant d'en ressentir les effets. Surpris par la soudaineté de l'incendie qu'il sentait brûler dans sa gorge et s'étendre jusqu'à son corps entier depuis l'intérieur, il écarquilla les yeux. Mais au lieu de lâcher prise, il soutint la douleur grandissante et enfonça plus profondément encore ses canines dans la peau meurtrie de sa victime, mordant plus violemment pour résister à la douleur.

Par le passé, il avait déja gouté le sang du dragon, qui lui avait alors été inoffensif. Mais Mythril était à ce moment sous une malédiction, et Alucard avait ainsi été épargné par le caractère sacré de son sang... Ce qui n'était plus le cas désormais. Semblable à la boule de lumière qui l'avait brûlé au manoir, le sang de son ami l'incendiait de l'intérieur, épreuve insoutenable qu'il s'infligeait lui-même. Car en dépit du supplice que cela constituait pour lui, Alucard continuait obstinément à s'abreuver aux veines du dragon, refusant de céder à sa peine.

Le vampire était plus fou de rage encore que de douleur, et il était résolu à défouler tout sa fureur sur son meurtrier, quitte à en payer le prix conjointement. Il tenta d'appeler par pensées le mercenaire, auquel il ne voulait pas confier sa détresse face à la torture du sang purificateur.

- DÉGAGE ! LAISSE-MOI, JE N'AI PAS BESOIN DE TA PROTECTION EN L'INSTANT ! RESTE A COTE, TU REPRENDRAS CETTE FORME UNE FOIS QUE JE SORTIRAI DU BÂTIMENT !

Mais sortirait-il de la bibliothèque, lui, et non ses cendres ? Il se sentait mourir avec son ami, dominé par la souffrance que son corps peinait à endurer. Soudain, une image frappa son esprit et parvint à le distraire assez pour apaiser un peu la brûlure du sang sacré. Une jeune femme en robe, taquinée par la brusquerie d'un vent puissant sur l'étendue d'une plaine fleurie.

Spoiler:

Diane. Le nom avait été appelé dans son esprit par la voix de Mythril, et un autre souvenir de ce dernier imprégna alors son esprit, faisant revivre un passé heureux que le dragon avait vécu avec sa fiancée.

Puis des cris, les bruits familiers de la guerre, la vision ensanglantée de corps s'échouant à terre. Le souvenir de Mythril se superposa alors à celui d'Alucard, dont l'esprit était perdu. Était-il un roi dragon menant les siens au combat pour affronter l'armée de son oncle sur Calypta ou un prince de Valachie ordonnant à ses hommes la défense de ses terres envahies par l'ennemi allié à son frère traitre ?

Les réminiscences de la guerre qui avait détruit la race de Mythril se succédèrent, se confondant avec une similarité troublante aux souvenirs du prince de Valachie qui, sans s'en rendre compte, avait fini par tomber au sol avec sa victime, sans pour autant la lâcher. Une nouvelle scène s'imposa à son esprit, un homme aux cheveux sombres souriait d'un air sadique. Alucard ressentait l'affliction de sa victime, que les moqueries cruelles du dragon ténébreux torturaient à elles seules. Mais Améthist ne se contenta pas du coeur déchiré de son neveu, et ses mots ayant faits leur effet, il acheva de le briser. Il approcha de Mythril...

Complètement paniqué, Alucard rejeta violemment sa victime. Les mains appuyées des deux cotés de la tête et les yeux fermés, il tentait désespérément de fuir les images qu'il ne voulait pas voir- qu'il ne supporterait pas de revivre. Mais le sang, puisé en quantité, lui transmettait malgré lui de derniers souvenirs. La mâchoire serrée et les joues mouillées de larmes rouges, le vampire fut le témoin involontaire du viol de son ami, souvenir qui une fois encore se confondit avec le sien. Son tortionnaire -tantôt un chef Ottoman, tantôt un parent devenu ennemi- prenait plaisir à lui arracher des cris de douleur, se réjouissait de ses larmes.

Petit à petit, les images s'estompèrent, en même temps que les brûlures, il put rouvrir les yeux. Choqué par ces souvenirs -ceux de Mythril autant que les siens-, Alucard ne comprit pas tout de suite ce qu'il faisait à terre, auprès de son ami sur le point de mourir et du mercenaire étrangement inactif. Les précédents évènements lui revinrent en tête, il se releva et, sans oser regarder son employé, ordonna sèchement :

- Soigne-le.

Il n'était plus en colère. Son passé commun avec le dragon avait noyé sa rage sous la tristesse, il n'avait plus envie désormais que d'être seul. Alors qu'il songeait au passé de Mythril, une pensée l'inquiéta. Il se retourna et le dévisagea d'un air sévère. Le bibliothécaire avait-il conscience d'avoir partagé avec lui ses souvenirs ? Et surtout, son esprit avait-il vu tout ce que le sien avait vu, leurs deux vécus confondus ?

Spectateur invisible, Ryu s’amusa du petit jeu du vampire. Notre mercenaire recouvrait en fait ce dernier comme une seconde peau, protégeant le Maître du sang des brûlures mortelles du soleil. Seul l’intérieur de la bouche du No Life King n’était pas couvert, bien qu’aucune démarcation ne soit visible pour permettre de le voir. La nouvelle peau d’Alucard imitait parfaitement la vrai, mais en plus résistante, infiniment plus résistante.

Sous cette apparence, le changelin pouvait rendre Alucard invisible ou changer ses traits, et même lui faire pousser des ailes ou des bras supplémentaires si l’envie lui prenait. Mais Alucard ne voulais pas de tout ça. Son action devait être éclatante ! Apparaître au grand jour, à la vue de tous, et montrer qu’il était bien là ! De retour !

L’intervention du dragon se produisit enfin, et le vampire le suivit à travers le mur. Mythril se doutait-il que la morsure d’un vampire draculien était différente de celle des autres vampires ? Quoi qu’il arrive la jeune femme était condamnée. A moins d’être pucelle, elle finirait morte ou changée en goule. Mais si la jeune femme était encore fille.. le changelin ricana mentalement en imaginant la tête de Mythril. Le roi d’or aurait alors une vampire a charge ! Alucard ne semblait pas y avoir pensé, laisserait-il vivre une infante non voulue ?

Durant son séjour, Alucard avait déjà conté par le menu au mercenaire la façon dont Mythril l’avait "tué". Ryu ne fut donc pas autrement surprit des allusions faites à ce sujet. Le jour de la malédiction avait également "touché" le changelin. Mais contrairement à ses deux amis, rien de ce qu’il avait fait ou vécu ce jour là n’avait été de en mesure de l’affecter. Il n’était cependant pas fâché d’être guéri.

Alucard s’amusa à faire traîner son bavardage, afin que la jeune employée de Mythril agonise le plus possible et que ses chances de survie s’amenuisent. Le choix laissé au dragon était sans issu, Mythril devait renoncer à la fuite et se battre ou se laisser faire. Ryu eu l’espoir infime de voir le jeune roi affronter le vampire. Mais le dragon choisit la résignation. Dommage, les ouvrages auraient soufferts, mais le combat aurait été épique. Bien sur, malgré toute son affection pour le dragon, Ryu aurait protégé son employeur. Mais est-il besoin de le dire ?

Le vampire planta alors ses crocs dans la chair de Mythril, buvant la vie du royale bibliothécaire. Le changelin ressentit la brûlure croissante que ce sang sacré infligeait à Alucard. Mais il sentait aussi la fureur et l’obstination du vampire. Ce dernier s’adressa alors a lui, lui ordonnant de se séparer de leur étreinte et d’attendre à coté. S’exécutant sans histoire, la peau du vampire se décolla comme une mue vivante qui s’ôterait d’elle-même, laissant apparaître sous elle, une peau blanche identique a celle qui s'était séparée. La mue vivante reprit alors la forme du mercenaire qu’elle était, mais le lien de sang n’était pas brisé.

C’est avec un intérêt curieux que Ryu suivit le combat intérieur d’Alucard. Si le vampire devait succomber, il faudrait qu’il agisse vite. Mais le changelin fut submergé par les souvenirs de Mythril, qui se mêlèrent soudain a ceux d’Alucard. Incapables de se dissocier l’un l’autre, les deux souvenirs se mélangèrent, et se confondirent pour n’en former plus qu’un. Sous la panique, Alucard rejeta sa victime, mais il était trop tard. Trop de sang avait été absorbé et les images se succédèrent, étrangement disparates. Ryu eu du mal à discerner à qui elles appartenaient, les deux souvenirs étaient si semblables !

Petit a petit, les images s’estompèrent, et le changelin redevint maître de ses pensées. Cette avalanche d’images et d’émotions l’avait frappé comme une vague dont il essayait encore de discerner chaque gouttelette. La voix de son employeur acheva de le sortir de sa transe, et un sourire ravi illumina son visage. Soigner Mythril, le changelin n’était pas mécontent de cet ordre !

A vos ordres, maître !

Il prit alors la forme du bibliothécaire, devenant un clone parfait, et changea son index en aiguille qu’il planta dans le cou de son ami, lui transfusant son sang de dragon d’or. Un sang au génome identique a celui de son receveur. Le changelin n’avait pas de problèmes pour faire pousser du sang dans ses veines, et donc en transfuser au dragon autant qu’il en faudrait. Mais pour la malédiction de la morsure, c’était une autre histoire. Pour y échapper Mythril devait rapidement dresser ses défenses sacrées.. en espérant que cela soit suffisant et qu’il ne soit pas trop tard !

Seigneur Mythril ! Il faut que vous combattiez l’infection qui est en vous !
Il faut agir vite, vous n’avez pas un instant !

Dit-il en essayant de secouer l’elfe blond. Quelque soit son état d’épuisement, il devait se battre.

La douleur était là, lancinante, et il ne pouvait rien faire. Cette douleur était sa punition et il l'acceptait tout en restant silencieux, retenant ses cris de douleur qui disparurent au fond de sa gorge pour ne jamais franchir ses lèvres pincées. Il pensait que tout était fini et commençait à plonger dans un doux rêve duquel il ne pourrait jamais se réveiller. Voilà comment il allait finir, voilà comment il allait s'éteindre lui et toute la race des dragons d'or.
Il se laissa transporter tranquillement surtout lorsqu'une image d'un visage bien connu lui apparu dans sa tête, un fin visage blanc comme neige, des lèvres et des cheveux aussi rouges que le sang et enfin des yeux dorés comme l'or... Sa chère et tendre Diane, voilà quelle était la dernière image qu'il aurait avant de quitter ce monde. Un sourire se dessina alors sur ses lèvres, maintenant il ne ressentait plus aucune douleur, jusqu'au bout il n'aura pensé qu'à elle, jusqu'à la fin il n'aura aimé qu'elle.
Sa douce félicité fut cependant de courte durée car se visage souriant d'un blanc immaculé fut tout d'un coup recouvert de rouge, rouge sang. Les champs de fleurs se changèrent en champs de bataille où s'écroulaient les uns après les autres ses camarades, son armée, son peuple. Diane était couchée au sol, gisant dans son propre sang, seul lui était seul au beau milieu de ce massacre. Ces souvenirs le choquèrent trop pour remarquer que certains soldats ne lui appartenaient pas, que le méchant en face de lui prenait tour à tour deux visages dont l'un lui était alors jusque là inconnu.
Le visage d'un homme portant le même visage que son père hanta alors son esprit. Ce sourire mauvais qu'il aurait préféré oublier ne le lâchait plus. Il vécu une seconde fois alors cette nuit fatidique où il avait perdu sa mère et son innocence et se mit à hurler comme un dément.
S'il avait réussi à garder jusque là le silence, cette vision fut de trop et il ne put se retenir, criant sa douleur ce qui eu pour effet de glacer le sang des quelques personnes aux alentours du bâtiment. Un cri de douleur qui devint petit à petit un hurlement draconien faisant vibrer les vitres de la pièce. Tour à tour un enfant blond et un enfant aux cheveux noirs se faisaient torturer sous ses yeux, ne comprenant pas vraiment ce qui se passait, il avait perdu toute force, toute combativité et lorsque le vampire le rejeta violemment, il se laissa tomber sur la sol, face contre terre sans bouger.
Il resta là en transe, sans esquisser le moindre geste, d'ailleurs il ne voyait plus du tout ce qui se passait tout autour de lui, seuls ses souvenirs le hantaient et repassaient sans cesse en boucle devant ses yeux.
Il sentit alors le mercenaire le piquer et eu pour réaction de l'écarter de lui en se mettant à hurler.

- Dégage! Ne t'approche pas de moi! Laisse moi crever!

Il s'était relevé et collé à un mur, il n'entendait pas les encouragements du mercenaire à se battre, non il avait abandonné, trop blessé pour faire quoi que ce soit. Il tremblait de tous ses membres, les yeux grands ouverts déversant toute sa peine qu'il avait oubliée. Il était assit là, dos contre mur et attendait sa mort, la perte massive de sang l'avait fatigué et le choc n'avait en rien arrangé la situation. Il acceptait cette mort douloureuse, après tout il devait être puni pour ses péchés...

Le rejet violent qu'avait exprimé Mythril pour l'aide du mercenaire désempara le No Life King. Il ne comprenait et ne partageait que trop sa douleur et son dégoût pour la vie... Mais voir ces émotions torturer de la même façon son ami, lui faire désirer la mort autant que lui, c'était une peine à laquelle il ne s'était pas attendu. Le dragon se montrait habituellement d'une nature si joyeuse et optimiste, il n'aurait pas imaginé retrouver en lui les mêmes cicatrices -le même désespoir.

Sa colère délaissée, il avait aussitôt recouvré l'amitié sincère qu'il portait au dragon depuis leur rencontre, malgré tout le mal qu'il lui avait infligé sous la violence de sa rancoeur... Il venait à peine de réaliser la vengeance qu'il avait tant attendue que déja, le mage de sang angoissait à l'idée d'être abandonné par l'un des proches qui lui étaient le plus cher -et qui probablement le comprenait mieux que personne, comme le laissait penser le passé commun qu'il venait de découvrir.

Il rejoignit le mourant et lui fit face, levant une main autoritaire à l'adresse de Ryu pour lui signifier de ne pas insister dans ses soins. Puis il s'agenouilla près de son ami et prononça son nom, mais ses appels ne l'atteignirent pas et il soupira. Lentement, il s'adossa à son tour contre le mur et ferma les yeux, replongeant dans les souvenirs mêlés de leurs deux esprits liés par le sang.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, il était de nouveau sur un champ de bataille rougi par le sang des cadavres éparses. Sous l'apparence humaine du Prince de Valachie, il s'avança jusqu'au roi dernier de sa race et l'observa un instant en silence avant de souffler dans un murmure :

- Ne t'avais-je pas demandé de cesser de fuir ?

Spoiler:

Il s'agenouilla à terre et plongea son regard azuré dans les yeux du dragon.

- Je sais... qu'il est difficile d'entrevoir l'espoir au travers des ténèbres d'un passé aussi douloureux. Que ces nombreuses vies vainement sacrifiées sont une perte que rien ne pourra jamais apaiser. Que les atrocités vécues ne seront jamais réparées ni oubliées. Que les regrets et la culpabilité sont d'un tel poids qu'ils ne laissent plus que l'ombre de soi, et que les rares plaisirs du présent ne sont plus appréciés que de moitié, amoindris par l'amertume d'un passé que le temps ne guérit pas. La vie est un choix tellement plus difficile que celui de se laisser mourir...

Il posa la main sur l'épaule du roi d'or, et son air affligé s'adoucit tandis qu'il poursuivait :

- Mais c'est un choix qui a tellement plus à offrir... même si cela ne t'apparait pas pour le moment. Les proches trépassés ne reviendront pas : mais ta peine à leur mort n'est-elle pas la preuve même du mérite de leur vie ? Rappelle-toi les raisons pour lesquelles tu leur étais tant attaché : les souvenirs de ces instants de bonheur n'importent-ils pas assez pour te donner la volonté d'entretenir leur mémoire, toi qui es le dernier représentant de ta race ? Tu as toujours été d'une telle générosité, je comprends que cette qualité ait fini par se fragiliser... mais tu ne peux pas décider d'abandonner, au détriment des sacrifices de ceux de ta race. Ils ont combattus pour leur roi. La vie est la plus grande preuve de reconnaissance que tu puisses encore leur adresser. Tu la leur dois. Par ailleurs...

Alucard esquissa un léger sourire et vint s'asseoir tout près de son ami, cessant de le fixer pour s'intéresser à l'horizon rougeâtre.

- L'avenir n'est peut-être pas si sombre qu'il ne le semble. J'étais venu me venger de toi, et je me retrouve désormais à te soutenir de mon mieux.

Amusé par l'ironie de la situation, il sentit son sourire s'élargir un peu.

- Sans pour autant retrouver ce que tu as perdu, tu peux encore découvrir des choses ou rencontrer des personnes qui sauraient te plaire assez pour valoir que tu continues. Parfois, des instants de premiers abords futiles s'avèrent plus tard de précieux souvenirs...

Contrôlé par l'esprit apaisé du Prince roumain, le champ de bataille s'estompa autour d'eux pour les laisser sur les terres vertes d'une plaine, où deux personnages se confrontaient l'un à l'autre :

-... comme si ta sottise et ta maladresse pouvaient me surprendre, je te rencontre à peine que je m'y habitue déjà. Et puis, on approche du château, le soleil va bientôt se lever, ce n'est pas le bon moment pour s'énervAAAAAAAH ESPÈCE DE JUMENT ÉCERVELÉE ! JE TE DÉFIE D'OSER REDESCENDRE DEVANT MOI, POULICHE A PLUMES !! ET PUIS JE TE RAPPELLE QUE TU VOLES AU-DESSUS DE MOI SANS PANTALON, IMBÉCILE DE TRAVESTI OBSCÈNE !!... REVIENS SUR TERRE IMMÉDIATEMENT !! MYTHRIL REDESCENDS TOUT DE SUITE OU JE TE REFAIS TA TOILETTE A MA FAÇON !!

Un Alucard en manteau rouge s'agitait avec humeur sous un arbre duquel finit par descendre un Mythril également rouge, mais de honte. Une autre scène se succéda à celle-ci et, toujours assis près de son ami, le mage continuait de faire revivre sous leurs yeux quelques souvenirs d'un passé commun.

- ...SAINT GRAAL, LE CALICE DIVIN, DÉTRUIT, APLATI, PULVÉRISÉ SOUS TON IMMENSE POSTÉRIEUR DE DRAGON BENÊT AU VISAGE NIAIS !! STUPIDE LÉZARD JAUNE DÉGÉNÉRÉ ! IMMONDE SERPENT AU CERVEAU DÉRANGÉ ! AFFLICTION REPTILIENNE ABRUTIE ! *** ******** ****** DE **** !! ******** *** ***** **** !!! ESPÈCE DE **** ****** *** ***** ! SALE ***** ***** DE ***** !!!

- Je suis vraiment désolé pour cela monsieur Alucard, tenez et peut être que son pouvoir sera toujours présent...

- ET TU VEUX QUE J'EN FASSE QUOI DE TA CRÊPE DIFFORME, IMBÉCILE ?!!


- Mais qu'est ce que vous faites à mon chien?!? Et qu'est ce que vous faites tous les deux dans ma chambre?!?

- MOUAHAHAHAHAAAAAAAA !

- OUCH !

- Excusez-moi Alucard mais il semble qu'ici les lieux sont tels qu'ils perturbent ma magie de sorte que je ne puisse prendre volontairement une apparence et qu'ils me contraignent à cette imposante forme... Mais voyez le bon coté, vous ne risquez plus la lumière du soleil avec mon corps pour protection hahaha!

- Une chance que je sois déjà mort, autrement j'aurais très sûrement succombé sous ton poids démesuré, mon corpulent amant ! Décidément, tu es de plus en plus lourd, et je précise que là encore, c'est dans les deux sens du terme... Pourrais-je savoir en quelle autre monstruosité la magie de cette pièce t'a transformé ?

Quelques autres épisodes défilèrent ainsi sous leurs yeux, puis Alucard se décida à conclure sur une dernière scène, dont l'ampleur la distinguait particulièrement de toutes les précédentes. Enfermé dans les cachots de la reine Angélique, l'ancien prince de Valachie agonisait contre le dragon d'or, qui approchait son museau vers lui. Acceptant le contact amical, il posa la main sur les écailles dorées et lui sourit tristement. Les doubles des deux compagnons se dissipèrent sous cette dernière image, et Alucard laissa à contre-coeur le champ de bataille rougir à nouveau leur environnement. Il tourna alors le visage vers son ami :

- Je continuerai, j'avancerai malgré les erreurs impardonnables qui m'incombent et les peines qui m'affligent. Je n'ai pas d'espoir de rédemption, mon âme est damnée. Mais j'arrive encore parfois à apprécier la vie autour de moi... et ce serait tellement plus difficile sans toi.

Le regard désolé, il expliqua au dragon :

- Tu es en vie, et tu as une âme. Tu peux espérer bien mieux que "d'apprécier la vie autour de toi".

Il laissa s'écouler quelques secondes de silence, puis termina sur un ton moins sérieux :

- Tu ne trouves pas qu'il serait dommage de laisser périr le héros de l'histoire quand le méchant se remet de ses blessures ? Un Niebien utopiste comme toi n'est-il pas plutôt amateur de fins heureuses ? Tu dois surement faire un très mauvais bibliothécaire.

Spoiler:

Après un sourire de réconfort à l'adresse de son ami, Alucard se releva. Il plongea son regard azuré dans les yeux du dragon et tendit la main vers lui, ordonnant avec douceur :

- Relève-toi, Mythril.

Il lui avait dit tout ce qu'il avait à dire. Si ses arguments n'avaient pas changé la décision du dragon, il n'insisterait plus et retrouverait seul la réalité. Il le ferait à regret, et meurtri d'une nouvelle perte particulièrement douloureuse.... mais il partirait. Il attendit avec angoisse le choix de Mythril, espérant qu'il finirait par saisir la main qu'il lui tendait afin qu'ils retrouvent ensemble la bibliothèque.

Alors qu'il effectuait sa ronde, un garde du Nieb fut appelé par un vieil homme, qui en quittant la bibliothèque blanche avait entendu un hurlement à la suite duquel les bâtiments s'étaient fermés. Il avait donc rejoint le lieu avec empressement, d'où justement une jeune femme s'enfuyait, portant dans ses bras le corps ensanglanté d'une demoiselle. Courant à son secours, il apprit ainsi l'attaque dont elles venaient d'être victimes, avec le bibliothécaire qui, lui, était toujours malmené par le vampire à l'intérieur. Le garde ne perdit pas un instant et, considérant en priorité le secours de l'elfe, il confia à un jeune homme qui passait par là le soin d'aider la jeune femme à porter au plus vite la blessée à Dame Liliel, et s'en alla chercher des renforts. Car si le seigneur Mythril n'avait pu se protéger d'un agresseur solitaire et avait jugé utile de fermer les bâtiments, il y avait peu de chance qu'il soit en mesure de le sauver à lui seul.

Une quinzaine de minutes plus tard, une troupe de dix soldats -humains et elfes- força les portes de la bibliothèque et finit par accourir dans la pièce où se trouvait un trio. Le seigneur Mythril était à terre, à côté d'un homme adossé comme lui au mur, mais il ne réagit pas à leur arrivée -pas plus que son compagnon. Les yeux fermés et le corps immobile, ils semblaient tous deux morts... Le garde conclut avec peine et fureur être arrivé trop tard.

Une troisième personne se tenait face à eux, à sa grande surprise, puisque l'employée n'avait cité qu'un unique ennemi au bibliothécaire et affirmé que les lieux avaient été vidés à leur seule exception. Le dirigeant de la troupe somma à l'intrus de les suivre sans opposer de résistance, prêt à ordonner à ses hommes de le soumettre par la force en cas de refus ou au moindre geste suspect, tandis que deux soldats s'avançaient vers le seigneur Mythril et son compagnon pour s'enquérir de leur état.

Allons donc ! Le clone de Mythril fit une mine boudeuse en croisant les bras. Voila que le dragon voulait mourir à présent. Il n’en était pas question ! Ryu avait pour ordre de le soigner, et il le ferait de gré ou de force ! Mythril était en outre bien trop affaiblis pour pouvoir luter. Levant les yeux au ciel, le changelin se para d’un sourire taquin et agita le doigt devant lui en signe de négation.

Adonc Messire ! Je ne puis accéder à votre requête ! Pourquoi mourir, me feriez-vous
l’écorne de m’ôter un ami ?

Le vampire passa alors devant le changelin, lui ordonnant d’un geste de la main de ne pas insister, puis s’agenouilla devant Mythril. Quittant les traits du roi d’or, Ryu poussa un soupir déçu. Mythril allait-il devenir vampire ? En fin de compte, cette idée était amusante aussi ! Son employeur s’adossa alors contre le mur, cote à cote avec le jeune roi. Allait-il tenter de raisonner Mythril ? Réfléchissant de son coté aux vieux souvenirs mêlés de ses amis qu’il avait capté, le mercenaire les laissa en tête à tête. C’est alors que des gardes firent irruption !

Souriant aimablement aux gardes, le changelin montra qu’il n’avait pas d’arme.

Je serais ravi de vous suivre, capitaine, et de répondre à toutes vos questions, mais je
dois d’abord attendre que mon employeur se réveil. Si vous me le permettez.

Entendant les gardes forcer la porte, le changelin s’était transformé en l’un des clients de Mythril. Les gardes allaient-ils croire qu’il travaillait ici ? Ryu ne pouvait pas abandonner Alucard ici et prendre le risque qu’il soit traîné dehors.

En son fort intérieur le dragon était assit, au beau milieu du champs rougit de ses semblables. Il ne bougeait plus, pas même lorsqu'un vampire eu fait l'effort de le tirer de son mutisme. Il écouta cependant les paroles lorsqu'Alucard se mit à passer des images de leurs souvenirs communs tout en s'asseyant à coté de lui : la plaine changea une fois de plus pour devenir un souvenir dans lequel le suceur de sang s'égosillait sur un pauvre dragon maintenant aussi rouge qu'une tomate.
et fini par le fixer, se demandant pourquoi son bourreau tentait de l'aider tout d'un coup. D'abord gêné il se mit petit à petit à rire devant le comique des situations, son ami avait du faire exprès de repasser les moments les plus drôles de leurs précédentes rencontres.
Il regarda enfin le dernier souvenir et eu un pincement au cœur en pensant à la peine qu'éprouverait ses connaissances, bien sur il y avait le vampire, ses employées des jeunes femmes qu'il avait sorti de la rue car elles avaient prouvé leur valeur à ses yeux, il y avait Archess, Ryu qui s'ennuierait surement sans lui, la petite princesse Amélia qui n'aurait plus de précepteur rabat-joie, Relyk aussi ne serait pas du tout du gout de laisser le dragon mourir. Il eu soudainement honte de s'être laissé abattre de la sorte et tout en fixant Alucard qui s'était relevé et lui tendait maintenant le main, il fini par afficher un faible sourire tout en acceptant la main offerte et l'attrapa tout en époussetant de son autre ses vêtements.
Il ouvrit enfin les yeux, sévèrement blessé mais assez lucide pour se rendre compte que des soldats étaient dans la pièces et Ryu était en difficulté... enfin il opposait une petite résistance et cela risquait de mal finir si il n'intervenait pas.
Se relevant péniblement sous les yeux de tous et pris leurs défenses.

- Arrêtez! Ceci est une méprise, ces deux hommes viennent de me sauver! Je vous prierais de ne pas trop les importuner et vous remercie de la rapidité à laquelle vous êtes intervenus.

Il s'écroula alors, trop de sang avait été perdu et ses forces le lâchaient.

- Les malfrats ont vite déguerpis quand monsieur Alucard et monsieur Ryu leur ont mis une bonne raclée! Ce sont deux individus dont un était venu en éclaireur et l'autre était arrivé une fois que mon employée eu du fuir. Ce sont deux ignobles individus pour l'un en rouge, un gros brun à la peau blanche et l'autre un petit blond aussi moche que méchant.

Mentit-il pour protéger ses amis, les soldats avalèrent les mensonges sans aucune difficulté et partirent une fois qu'ils s'étaient assurés de la sécurité des lieux, le lendemain il y aurait surement des avis de recherche et des soldats à toutes les portes du bâtiment.
Il était enfin soulagé mais fini par tomber dans les vapes, en effet cet imbécile avait sa tête occupé par la sécurité de ses amis qu'il avait oublié de demander lui même de l'aide et il était toujours en manque de sang...

Soulagé de la décision de son ami, Alucard le releva d'une poigne ferme et rouvrit les yeux pour retrouver la réalité avec lui. Mais alors qu'ils les croyaient seuls avec Ryu, une troupe de soldats envahissait à présent la pièce, le faisant se redresser en sursaut, prêt à attaquer. Mythril intervint à temps pour éviter un massacre, il tourna vivement la tête vers le dragon, tout étonné que celui-ci mente à l'armée du Nieb venu le secourir afin de protéger ses agresseurs. Il fut beaucoup moins surpris, en revanche, de le voir s’effondrer à terre. Alucard le regarda en souriant, tout de même fier de son "travail", puis ordonna :

- Finis de le soigner, mercenaire, mais prends soin de lui laisser ses cicatrices à la gorge. Puis rejoins-moi à son bureau, je vous y attends.

Il s'apprêta à partir mais revint soudain sur ses pas, profitant de ce que Ryu était encore son employé pour ajouter :

- Ah, et je ne veux pas que tu lui répondes en dehors de ma surveillance donc s'il te parle, tu ne répondras que par "Vraiment, vous n'êtes qu'une chochotte seigneur Mythril. CHO-CHOTTE !!!", comme si cela te venait naturellement. Et ce quoi qu'il te dise... Non, en fait tu le lui diras dès son réveil même s'il reste silencieux, et le lui répéteras ensuite obstinément s'il s'adresse à toi.

Sur ces derniers mots, il passa au travers du mur et parcourut le couloir encadré par de longues rangées d'étagères pour aller s'installer confortablement sur la chaise du bibliothécaire. Plongé dans ses pensées, il ne vit même pas le vieil homme qui entra dans le bâtiment et s'attarda devant une rangée de livre, avant de revenir devant lui.

- Excusez-moi, je cherche un livre et il se trouve qu'il s'agit de celui-là même qui est sur ce bureau. Je vois que vous ne l'utilisez pas : puis-je le prendre ?

L'esprit ailleurs, Alucard lui tendit négligemment le livre et s'enfonça à nouveau dans ses songeries tandis que l'érudit le remerciait. Tout à coup, il réalisa son élan de gentillesse involontaire et, honteux, regarda d'un air horrifié le vieillard contempler d'autres ouvrages un peu plus loin, le livre qu'il lui avait donné fermement serré contre lui. Agissant sous la panique, Alucard fit la première chose qui lui passa par la tête : il s'empara de l'énorme pile de livres dressée sur le bureau et la projeta violemment au visage de l'érudit, qui les reçut de plein fouet avant de s’effondrer à terre, assommé. Dans la lancée, les ouvrages étaient passés juste sous le nez des deux autres membres de son trio, qui étaient venus le rejoindre. Voulant justifier sa réaction, il tenta de trouver les mots pour expliquer en quoi le réflexe poli provoqué par le vieillard avait constitué une insulte et, rien de sensé ne résultant de sa réflexion, argua tout simplement d'un ton agacé :

- C'est lui qui a commencé.

Sans plus se soucier de l'érudit, il changea de sujet :

- Puisqu'un taré en cuir de sado-maso a quelque peu incendié mon manoir, je n'ai plus d'habitat où dormir...

Il se tourna vers le mercenaire :

- Enfin plus d'habitat qui ne me couterait pas une bourse par jour.

Puis vers Mythril :

- Alors voila : une fois que j'aurai retrouvé mes disciples et que je pourrai donc annoncer officiellement mon retour, j'engagerai les constructions d'une nouvelle demeure. En attendant, tu peux t'arranger avec le changelin pour qu'il me loge à tes frais -et après m'avoir supporté toutes ces semaines je doute fortement qu'aucune somme ne le convainque. Ou bien tu peux me laisser ta chambre à la cour. Dans tous les cas, je refuse l’hôtel. Quelle que soit la solution que tu me trouveras, j'exige un confort selon mes goûts.

Un gémissement répondit au vampire avant le dragon, à son grand agacement. Foudroyant le vieillard du regard, il s'énerva :

- Aaaah, mais il m'ennuiera jusqu'où bout, le vieux ! Ryu, t'est-il possible de nous transporter directement d'ici à une place plus accommodante ? J'aimerais une terre où nous pourrions converser sans être dérangés...

Peux enclins à écouter les dires du changelin, les gardes s’apprêtèrent a le maîtriser de force. Ryu ne montra aucune résistance.. les menottes inhibitrices n’étaient pas suffisantes pour bloquer son don de polymorphe. Mais même sans cela, bon prestidigitateur, notre mercenaire connaissait milles techniques d’évasions pour ôter des menottes. Être arrêté n’était pas un problème, mais il était hors de question de quitter ses amis avant qu’ils se réveillent, ni de laisser les gardes les emmener dehors sous les rayons destructeurs du soleil !

Par chance, Myhtril reprit conscience et rassura les gardes avant qu’ils ne saisissent le changelin. La notoriété du dragon lui acquit la fiance totale des gardes qui s’excusèrent d’avoir tenu Ryu pour suspect. Le remerciant même, ainsi qu’Alucard, d’avoir sauver le roi bibliothécaire. Le mensonge de Mythril étonna Ryu, qui sourit largement d’un sourire amusé et surprit. Le monarque, un modèle de droiture, était donc capable de mentir pour sauver quelques vies ? Une fois les gardes partis, sains et saufs, Alucard enjoignît à Ryu de poursuivre son traitement. La transfusion était en effet très urgente, Mythril avait déjà perdu bien trop de temps ! Reprenant la forme du dragon, le mercenaire ne perdit pas un instant ! Le commandement que lui donna alors le conte valaque arracha un rire au clone mythrilesque.

A vos ordres messire ! Il en sera tel que vous l’avez dit !

Un nouveau gloussement hilare s’éleva tandis que le vampire s’éloignait. Et comme susdit, Ryu accueillit le réveil du roi avec la phrase clef. S’exclamant avec une joie non dissimulée.

Vraiment, vous n’êtes qu’une chochotte seigneur Mythril. CHO-CHOTTE !!!

A ce moment là, Ryu avait déjà reprit son propre visage, la transfusion étant depuis un moment finie. Le dragon ne semblait pas être devenu une goule, mais cela ne voulait pas dire que ça n’arriverait pas. Aidant son ami à se relever, le changelin répéta inlassablement la même phrase à chaque question que lui posa Mythril. Lui lançant des "chochotte" avec un grand sourire, tout en le conduisit jusqu'à son bureau. Un ouvrage vola a raz de nez des deux blonds lorsqu’ils arrivèrent dans la pièce : Quoi qu’ai commencé le vieil homme ce dernier ne semblait pas en état de finir ! Alucard expliqua alors a Mythril, sous l’oreille attentive (et amusée) de Ryu, ce qu’il attendait du dragon quant a son relogement en attendant de se faire rebâtir une demeure..

Le vieil homme revint à ce moment a lui et ses gémissements agaçèrent Alucard, qui s’interrompit. Son employeur demanda alors à Ryu un lieu plus tranquille où ils ne seraient pas dérangés. La demande tenait hors du contexte de son contra de garde du corps, mais le changelin accepta tout de même, considérant cela comme un service à un ami.

Le changelin se transforma soudain en une abomination informe et, sans leur laisser le temps de réagir, avala ses deux amis d’une seule traite ! Portée par deux lourdes ailes, l’abomination s’éleva d’un coup et transperça le plafond. Tout se passa en quelques instants à peine, et, grossissant toujours, l’abomination laissa bientôt place à une grande tour de pierre flottant sur un îlot d’aérolithe. De la roche volante. La tour ne comportait ni porte ni fenêtres, et ne possédait qu’une unique pièce, tout en haut, une vaste sale où se trouvaient Alucard et Mythril. Haute de 300 mètres, la tour flottait à 2 000 pieds d’altitude et s’éloignait doucement de la ville. Cette forme avait par contre mis fin au lien de sang unissant Ryu à son employeur.

L’endroit vous convient-il ? La voix de Ryu venait directement des murs de la pièce.

La pièce était couverte d’un grand tapis de sol, ainsi que de tapisseries sur les murs. Plusieurs pierres du plafond offraient une lumière artificielle, et une cheminée poussa d’un coup sur l’un des murs, s’ouvrant comme un gros œil. Deux confortables canapés poussèrent du tapis.

C'est groggy que le dragon d'or se réveilla, la bouche pâteuse et l'esprit embrumé d'un long sommeil sans rêve. Il fixa alors les lieux pour y trouver un Ryu tout sourire qui l'accueilli par un magnifique.

- Vraiment, vous n’êtes qu’une chochotte seigneur Mythril. CHO-CHOTTE !!!

Il voulu questionner le changelin sur une telle attitude mais devant la répétition de ces mêmes mots, il fini par se douter que monsieur le vilain vampire dont il avait sauvé les miches y était pour quelque chose. Il fini par se lever difficilement et suivre le mercenaire assez guilleret.
Ils arrivèrent donc dans une place où ils furent accueillis par une volée de livres qui leurs passa sous leurs nez, manquant de peu de les assommer et de ramener le seigneur doré dans le monde des songes duquel il était pourtant sorti depuis peu. Le responsable leur balança une excuse qui failli faire s'étouffer le dragon. Mais il changea bien vite de sujet et le dragon se fit tout petit devant les accusations lancées à son encore par le ténébreux personnage et failli rigoler devant les sous-entendus fait au changelin.
Il proposa une solution que le dragon accepta sans condition, après tout il était lui-même responsable de la situation dans laquelle le vampire était et c'était pour lui tout naturel d'y pallier.

- Bien entendu mon bon ami! J'accepte de vous héberger dans ma modeste chambre au château des reines, à moins que vous vouliez me joindre dans mon propre château, il se situe dans le désert de lumière.

Dit-il alors que l'homme habillé en rouge demanda à Ryu de les emmener autre part, il se fit donc avaler en même temps qu'Alucard par une des transformations du changelin et fini dans une tour qui se forma peu après un bruit de fracas.
Il dit alors d'un ton las.

-Toutes réparations de vos dégradations mon ami Ryu se feront à vos frais bien entendu, et j'ose espérer qu'aucun livre n'ai été endommagé! Mais je dois avouer que les lieux me plaisent grandement!

Affirma-t-il tout en s'asseyant sur l'un des deux fauteuils qui venaient d'apparaitre dans la salle.

Aux révélations faites par le vampire, le dragon fut quelque peu surpris. Peut-être l'eut-il su en lisant l'un de ses livres mais c'était l'une des choses que son esprit avait occulté, pour lui ce devait être une information pas vraiment utile ou alors son long sommeil avait-il eu raison de sa mémoire... Il acquiesça alors de la tête pour montrer qu'il avait bien compris ce que le vampire bougon lui dit mais fut tout de même assez surpris d'entendre sa voix résonner dans sa tête.
Mais les questions posées lui brisèrent le cœur, ces souvenirs-là il aurait tellement voulu les oublier pour de bon mais il ne le pouvait pas. Peut-être ce vampire pourrait-il apaiser ses tourments et l'aider à chasser ses démons. Toujours est-il que malgré l'amertume il décida de parler, enfin de penser.

" Pour dire la vérité, je ne sais pas ce qui a pu causer cette folie à mon oncle, peut-être que le fait qu'il ai vu la reine Angélique peu de temps avant le drame y soit pour quelques chose... Mais voilà un soir il perdit tout bonnement la raison et s'attaqua à mère, il voulait... il la voulait mais elle s'est défendue et à sacrifier sa vie pour me protéger. Dans un accès de colère il me fit ce que vous avez pu voir... je ne m'attarderais pas là-dessus..."

Dit-il alors que son cœur se serrait dans sa poitrine et que son souffle se fit plus difficile. Il passa alors la main dans ses cheveux et fini par respirer un bon coup avant de continuer le dialogue mental.

" Et oui je l'ai vaincu... enfin j'ai réussi à l'enfermer dans les enfers avec l'aide de dame Gaerty, mais cela n'a servi à rien car je fus le seul survivant... tous mes amis, ma famille, mon peuple... tous avaient péri lors de cette guerre. C'est pourquoi je me suis jeté dans ce long sommeil sans rêve, pour tenter d'expier mes fautes..."

Il fini par mettre sa tête entre ses mains et ne prononça plus mot, attendant tout simplement. Des blessures qu'il croyait guéries venaient d'être ouvertes et la douleur fulgurante l'avait ébranlé. Il lui fallait un peu de temps avant de pouvoir s'en remettre.